Conseil oecuménique des Eglises
COMITÉ CENTRAL
Potsdam, Allemagne
29 janvier - 6 février 2001
Document No. GS 1.2


Approuvé

RAPPORT DU PRÉSIDENT

Tenue à la fin du siècle le plus violent de l'histoire humaine et au seuil du troisième millénaire, la Huitième Assemblée du Conseil oecuménique des Eglises a décidé de faire de la période 2001--2010 la Décennie "vaincre la violence". En réponse à cet appel, le Comité central, lors de sa dernière session d'août 1999, a envoyé une lettre aux Eglises pour leur rappeler cette décision de l'Assemblée et les inviter à participer de manière concrète et réfléchie à cette Décennie. En même temps que cette lettre, les Eglises ont reçu un Message plus détaillé du Comité central, dans lequel il souligne l'importance cruciale et l'urgence de cette Décennie, définit ses objectifs et soumet des questions à la réflexion des Eglises et du mouvement oecuménique, en les invitant à se prononcer sur ce sujet. C'est au cours de la présente session que le Comité central lancera officiellement la Décennie "vaincre la violence".

D'une manière ou d'une autre, la violence a toujours figuré à l'ordre du jour oecuménique. Plus que jamais, elle demeure une question complexe et délicate. Au moment où nous nous préparons à affronter cette étape importante et exigeante de la vie et du témoignage du Conseil, je souhaiterais vous faire part de quelques réflexions personnelles.

COMPRENDRE LA VIOLENCE

Il n'est pas possible, dans le cadre de ce rapport, d'entreprendre une analyse anthropologique et sociologique de la violence, aussi ma réflexion va-t-elle porter surtout sur la manière de vaincre la violence. Il importe, pour commencer, de mettre en évidence certains faits et points de vue concernant la violence.

1) La violence existe depuis qu'il y a des humains et elle touche tous les secteurs de la société. On la trouve à l'intérieur de nos familles, de nos structures, de nos Eglises, de notre vie quotidienne, de nous-mêmes. En devenant mondial, ce phénomène a acquis une dimension et une urgence nouvelles. Le flux de la violence mondiale menace l'environnement et chaque société. Bien que notre monde ne soit plus divisé en deux blocs, les guerres continuent à y sévir toujours plus fréquemment. Les pays s'effondrent, les frontières sont redessinées, les cartes changent constamment. Les préjugés ethniques, nationaux et religieux attisent des conflits violents, et la haine divise les sociétés. La violence affecte aussi notre théologie, notre spiritualité et la conception que nous avons de nous-mêmes en tant que chrétiens et en tant qu'Eglises.

2) La violence est synonyme d'agression, d'utilisation abusive de la force physique, mentale ou spirituelle, avec l'intention de faire du mal. La crainte, la haine, l'injustice, l'insécurité et les préjugés figurent au nombre des causes principales de la violence. La violence est omniprésente, sans distinction de race, de classe, de culture ni de religion. Elle revêt des dimensions et des aspects multiples et diffère, dans sa forme et son expression, d'une culture à l'autre, d'un contexte à l'autre, d'un individu à l'autre. D'une manière générale, on peut distinguer deux grandes formes : la violence directe ou personnelle et la violence structurelle. Ces deux formes sont à la fois cause et conséquence et agissent l'une sur l'autre. Les actes de violence vont des brutalités policières aux interventions armées, de la domination masculine aux diverses formes de racisme, des émeutes aux conflits ethniques, de l'usage des armes à feu au viol, etc. La violence est également inhérente à certaines formes de gouvernement et est devenue indispensable à de nombreuses structures et idéologies, orientations et pratiques politiques en tant que moyen de maintenir les privilèges et la domination. La haine raciale et ethnique peut même déboucher sur le génocide et la "purification ethnique", comme on l'a vu au Rwanda, en Bosnie et au Kosovo. La mondialisation, accompagnée de l'hégémonie des sociétés transnationales, des institutions financières échappant à tout contrôle et des mass media mondiaux, est devenue une nouvelle source de violence. D'une manière générale, la répartition inéquitable des ressources dans une société et l'usage injuste et abusif du pouvoir peuvent être considérés comme autant de facteurs engendrant la violence. Etant donné la généralisation de la violence et ses conséquences illimitées, il faut, hélas, parler d'une "culture de la violence" qui déshumanise les gens et détruit la création.

Comment réagir à ce mal qui menace la vie même ? L'attitude chrétienne face à la violence a toujours été ambiguë et ambivalente. Il est nécessaire d'adopter des approches herméneutiques et contextuelles pour comprendre la violence, dans son cadre propre comme dans une perspective intégrée. Pour commencer, demandons à la Bible de guider notre réflexion.

LA BIBLE, CADRE DE REFERENCE

La violence est très présente, dans l'Ancien Testament comme dans le Nouveau. Elle consiste à faire du mal ou du tort ou à être injuste; elle est synonyme de péché contre Dieu et contre les humains (Gn 6, 11-13; Pr 4, 17; Es 59, 6) et ses contraires sont la paix et le salut. Dieu sauve ses fidèles de la violence et les conduit à la libération (2 S 22, 3; Ps 72,14). Plusieurs actes violents sont également attribués à Dieu, décrit comme un guerrier (Ex 15, 3), qui combat contre le peuple élu (Lm 2, 5). Dans le Nouveau Testament, on trouve des passages qui justifient la violence, par exemple la purification du Temple (Mt 21,12 ss), l'exorcisation des puissances démoniaques (Mc 5; Jn 12, 31; 16, 11), la violence verbale exprimée dans les paraboles du jugement (Mt 25) et du festin nuptial (Mt 22), sans oublier les paroles du Christ : "Je ne suis pas venu apporter la paix, mais bien le glaive" (Mt 10, 34 ss). Mais on trouve également des passages qui témoignent de l'attitude non violente du Christ : "Remets ton épée à sa place" (Mt 26, 52), ou encore l'ordre d'aimer nos ennemis, de bénir ceux qui nous maudissent, de faire du bien à ceux qui nous haïssent et de prier pour ceux qui nous persécutent (Mt 5, 44 s).

Quelques éléments méritent d'être soulignés :

1) Il semble qu'il y ait une certaine ambiguïté dans la Bible au sujet de la violence et de la non-violence. En fait, la manière dont les chrétiens lisent la Bible dans le contexte du débat sur ce sujet est souvent partiale et unilatérale. Les chrétiens ont cité et interprété la Bible pour répondre à l'esprit de leur temps et n'ont pas approfondi suffisamment leur réflexion pour discerner la place de la violence et de la non-violence dans leur cheminement de foi. Cette ambiguïté subsiste en dépit du grand nombre de textes théologiques consacrés au sujet. C'est pourquoi il est indispensable qu'en prenant la Bible comme référence, nous le fassions de manière attentive et globale.

2) La Bible est l'histoire du salut. L'intervention de Dieu dans l'histoire est cruciale pour le salut. Dans la Bible, la violence s'oppose à l'amour de Dieu et à sa volonté. Dieu est puissant, mais non pas violent. Il fait usage de sa puissance pour son Royaume, et avec l'intention d'apporter le salut à son peuple. Pourtant, il arrive que Dieu se réfère à la violence pour en révéler la nature destructrice et souligner l'exigence de paix. C'est pourquoi la violence et la paix, l'oppression et la justice s'opposent toujours dans la Bible ; elles font partie du plan mystérieux de Dieu.

3) Dans le Nouveau Testament, Dieu a donné une signification nouvelle à l'histoire du salut. Les déclarations pacifiques du Christ et certaines de celles qui sont marquées par la violence doivent être considérées dans la perspective du Royaume de Dieu qui s'est rapproché, bien que son accomplissement se situe au-delà de l'histoire. Les passages violents expriment la puissance et l'autorité de Dieu, comme, par exemple, lorsque Paul parle de revêtir l'armure de Dieu pour nous défendre contre nos ennemis (Ep 6). La croix et la résurrection marquent la défaite de la mort. Le Christ exerce son pouvoir et son autorité en vue du Royaume d'amour et de justice, de paix et de réconciliation. L'irruption du Royaume de Dieu implique la violence.

4) Le dessein de Dieu en Christ est de libérer, de guérir et de transformer toute l'humanité et toute la création. L'opposition, la résistance et le rejet ont accompagné en permanence la vie et la mission du Christ. Mais la violence n'a pas de place dans l'économie divine. La violence est destructrice, synonyme de mal et de mort. Voilà ce qui se trouve au coeur de la révélation divine et qui constitue un enseignement crucial de la Bible.

5) L'accomplissement de la paix dans la justice est l'objectif ultime du ministère du Christ. Il est au coeur même du Royaume. La naissance du Christ a été annoncée comme la venue de la paix dans le monde, et le Christ s'est décrit comme la vraie paix du monde. Il a promis le Royaume aux pacifiques. Il s'est opposé fermement à l'injustice et a fait cause commune avec les pauvres, les opprimés et les victimes de l'injustice et de la violence, en les soutenant dans leur lutte pour la justice et la dignité.

6) Vaincre le mal par le bien (parabole du Samaritain, Lc 10) est un élément crucial de l'enseignement de Jésus. En d'autres termes, réagir à la violence par la violence est incompatible avec le Nouveau Testament. Jésus n'a pas recouru à la violence pour secourir les opprimés. Il lui est arrivé de se sentir frustré par la violence des puissants ou d'y répondre par l'humilité en s'y soumettant, comme il l'a fait sur la croix. "Porter sa croix" implique à la fois la lutte non violente et le sacrifice de soi. C'est pourquoi la Bible nous enseigne à vaincre la violence : "Ne te laisse pas vaincre par le mal, mais sois vainqueur du mal par le bien" (Rm 12, 21). Le fait que le Christ renonce à la violence ne doit rien au hasard mais résulte d'un choix délibéré.

D’AMSTERDAM A BERLIN : UN DEBAT OECUMENIQUE PERMANENT

Au COE, la question de la violence a été soulevée dans plusieurs contextes et à propos de divers problèmes oecuméniques. Pendant les premières années, la théorie de la "guerre juste" était au centre des débats, puis vint le problème de la participation des chrétiens aux conflits armés. Lors de la Conférence mondiale d'Eglise et société de 1966, la question de la violence révolutionnaire exercée contre des systèmes d'oppression fut au centre des débats oecuméniques. Les Eglises ont eu des opinions divergentes au sujet du Programme de lutte contre le racisme (PLR) : certaines, estimant que le mouvement oecuménique était un mouvement pacifique, ne pouvaient pas admettre de soutenir des groupes et des mouvements luttant contre le racisme.

A la Quatrième Assemblée (Upsala, 1968), on demanda au Comité central d'examiner comment le COE pourrait encourager des études sur les moyens non violents de changer la société. A la suite des controverses soulevées par le Fonds spécial du PLR, le Comité central décida en 1971 de lancer un nouveau processus de réflexion sur la question de la violence et de la non-violence. Le rapport du Colloque "La violence et la non-violence et la lutte pour la justice sociale" (Cardiff, Pays de Galles, 3--7 septembre 1972) constitue l'analyse la plus attentive et la plus approfondie du problème jamais réalisée par le COE. Ce texte préconise l'action non violente et définit une série de critères à examiner avant de recourir à la violence dans des circonstances exceptionnelles. Il faut souligner qu'il ne condamne pas catégoriquement les groupes de libération qui se sentent obligés de se servir de la force.

A la fin des années 1970, la résurgence du terrorisme vint envenimer le débat sur la violence, tandis que le militarisme et la course aux armements lui ajoutaient une nouvelle dimension. En 1979, le Comité central demandait aux Eglises d'accorder l'attention requise à la question de la violence et de la non-violence en encourageant des modèles de règlement pacifique des conflits. Quatre ans plus tard, dans la perspective de la Sixième Assemblée, un colloque restreint (1983, Ballycastle, Irlande du Nord) fut organisé pour examiner le débat en cours sur la violence et la non-violence en tenant compte de l'évolution du contexte mondial. Près de dix ans plus tard, le Rassemblement mondial "Justice, paix et sauvegarde de la création" (JPSC, 1990, Séoul) plaçait la question au-delà de la dichotomie entre la violence et la non-violence pour lui ajouter une dimension écologique. On y a préconisé "une culture de la non-violence active" en vue de rechercher "par tous les moyens possibles à établir la justice, réaliser la paix et résoudre les conflits grâce à une non-violence active".1 En 1994, le Comité central a décidé la création du Programme "vaincre la violence" (PVV) en vue de mettre en question et de transformer la culture mondiale de la violence, pour qu’elle cède la place à une culture de paix juste".2 C'est ainsi que le PVV en est venu à être considéré comme le prolongement naturel du processus "JPSC". Il repose en effet sur les affirmations suivantes, émanant du débat sur ce processus : la paix et la justice sont indissolublement liées, la guerre ne peut plus être considérée comme un moyen légitime de résoudre les conflits, la non-violence active permet d'établir la justice, de réaliser la paix et de résoudre les conflits. La campagne Paix dans la ville, lancée par le Comité central en 1996 dans le cadre du PVV, a mis en évidence la volonté du Conseil de vaincre la violence.

Ce bref coup d'oeil sur le débat oecuménique3 ne prétend pas donner un reflet fidèle des discussions souvent longues et ardues consacrées à ce sujet, aussi complexe que délicat. Il importe toutefois de souligner brièvement certains aspects caractéristiques du débat en cours :

1) Issues de milieux et de contextes divers, les Eglises ont forcément des vues divergentes sur la violence et la non-violence. Certaines considèrent que l'enseignement de Jésus-Christ au sujet de la non-violence constitue la voie à suivre, tandis que d'autres y voient un "idéalisme irréalisable". D'autres encore sont fidèles à la nécessité de résister face à la violence. C'est pour cette raison que le débat demeure dominé par l'ambiguïté, le manque de clarté et la polarisation et que le Conseil n'est pas encore parvenu à un consensus au sujet de cette question brûlante.

2) On recourt à la Bible aussi bien pour justifier la violence que pour préconiser la non-violence. Souvent, les Eglises se trouvent en face de dilemmes, dont la Guerre du Golfe et la crise du Kosovo constituent des exemples récents.

3) Au coeur du débat du Conseil sur la violence figuraient le racisme et plus particulièrement l'apartheid, alors que d'autres formes de racisme et d'autres types de violence ont moins retenu l'attention. Le processus "JPSC" a élargi à la fois la perspective et la portée de la discussion, mais sa vision holistique n'a pas réussi à s'imposer dans la phase de réalisation.

4) Le débat oecuménique a fait surgir deux manières de réagir à la violence : le conflit révolutionnaire et la résistance non violente. L'engagement en faveur de la justice, de la paix et de la réconciliation par l’action non violente est demeuré constamment présent durant toute cette discussion. Il faut souligner que le PLR a ouvert la voie à l'idée de "la violence en dernier recours".

VAINCRE LA VIOLENCE : UNE STRATÉGIE oeCUMéNIQUE

Au cours de la période qui commence, la violence sera de nouveau, et plus que jamais, au premier plan des préoccupations oecuméniques. Les Eglises et le mouvement oecuménique sont mis au défi de réagir face à ce qui constitue le problème le plus urgent et le plus grave de notre époque.

Nous sommes marqués par les amères expériences issues de nos histoires respectives. Notre théologie du pacifisme s'oppose à notre théologie de la guerre juste. En outre, non seulement les Eglises ne définissent pas d'une seule voix et clairement la manière de répondre à la violence, il arrive aussi qu'elles constituent un élément du problème. Voici ce que le Comité central affirmait en 1999 : "Cessons d'être des spectateurs de la violence, cessons de la déplorer sans agir. Agissons pour la vaincre."4 Il y a trois manières de réagir à la violence : la passivité, l'opposition violente et la non-violence active. A la question fondamentale : faut-il fuir ou lutter ? il ne peut y avoir qu'une réponse chrétienne : lutter. Ce n'est pas là une simple affaire de stratégie ni de méthodologie. Cette vision et cet engagement découlent du fait même que nous sommes de nouveaux êtres humains et une nouvelle communauté dans le Christ. La passivité est synonyme de soumission, de retraite et de capitulation. Le chrétien doit vaincre la violence, non pas en y réagissant de manière violente mais en pratiquant une résistance non violente active qui suscite une vision et une espérance nouvelles. Certains sont toutefois d'avis que la violence révolutionnaire constitue le seul espoir de justice et de libération. Pour ma part, je crois que la formule de l'action non violente positive, adoptée en 1992 par le Comité central, doit demeurer l'option privilégiée pour tenter de vaincre la violence. Que faut-il entendre par "action non violente positive" ? Voici quelques éléments qui méritent de retenir notre attention :

1) La non-violence n'est pas un compromis, ni une attitude aveugle et dénuée d'esprit critique, ni un synonyme de non-résistance et de désengagement. Elle est le courage de la foi qui ose dire non à la violence et non à l'injustice. La non-violence est une attitude qui implique la patience et la vision, une forme de combat qui refuse de collaborer avec l'injustice et qui défie la violence par son opposé, la non-violence. Elle consiste à lutter avec des armes psychologiques, sociales, économiques et politiques, c'est-à-dire par les moyens suivants : la protestation (marches, veillées, piquets, etc.) et le refus de coopérer (boycottages, grèves, sanctions économiques, désobéissance civique, etc.). L'action non violente est un moyen d'exprimer l'intégrité, l'identité et l'indépendance de l'individu. L'histoire moderne abonde en exemples de luttes non violentes, du Mahatma Gandhi à Martin Luther King, de la chute du mur de Berlin (1989) à la Yougoslavie (2000). La violence engendre la violence, tandis que la non-violence révèle l'impuissance des puissants et met en question l'efficacité et la validité de la violence.

2) La lutte contre la violence par la non-violence invite les Eglises à éviter de s'identifier aux structures du pouvoir. L'Eglise doit devenir une communauté sans pouvoir, une communauté qui n'a d'autre pouvoir que l'absence de pouvoir de Jésus-Christ. C'est par cette absence de pouvoir, c'est par la croix qu'il a vaincu les puissants et le mal. L'Eglise a souvent pris le parti des puissants de ce monde et a souvent recouru à la violence, même pour annoncer la bonne nouvelle. L'alliance aveugle des Eglises avec la fierté nationale et les pratiques des gouvernements de leurs pays remet sérieusement en question leur rôle prophétique. Souvent, les Eglises sont appelées à choisir entre les intérêts de leurs pays et le message de l'Evangile. En fait, les réactions diverses des Eglises aux conflits en Iraq, au Moyen Orient ou au Kosovo -- pour ne citer que quelques exemples récents -- montrent bien les effets concrets des relations entre l'Eglise, la nation et l'Etat. C'est là un domaine délicat, qui exige un débat approfondi et d'une large portée.

3) Pratiquer une non-violence active, c'est être du côté des victimes. C'est la seule manière de demeurer fidèle à l'Evangile. Le Christ s'est identifié aux victimes parce que ce sont elles qui remportent la vraie victoire, puisqu'elles héritent du Royaume. L'action non violente des Eglises ne doit pas se contenter de vaincre la violence : elle doit aussi favoriser la justice et la paix. En d'autres termes, la non-violence ne doit pas être un but en soi mais uniquement un moyen de réaliser la justice et de restaurer la paix. Cette responsabilité de l'Eglise ne saurait être mise en question, dans quelque circonstance que ce soit, mais elle peut être mise à l'épreuve. Après avoir pansé les plaies (diaconie sociale), il faut lutter de manière non violente pour éliminer les causes profondes de la violence (diaconie politique).

4) Les Eglises n'ont pas toujours été cohérentes dans leur façon de réagir aux situations de violence. Dans des situations critiques, la peur, la patience et la prudence ont souvent prévalu sur le ministère prophétique de l'Eglise. Quelle est la signification de la croix pour la vie et le témoignage de l'Eglise dans le monde actuel ? La voie du compromis facile ne saurait être celle des chrétiens. La violence est l'impuissance des puissants ; il faut lui opposer la croix, réaction non violente et forte. Nous mettons notre confiance en Dieu ; il est notre forteresse, notre protecteur, notre arme contre le mal : "si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ?" (Rm 8,31). L'Assemblée de Harare nous a mis au défi de vaincre "l'esprit, la logique et la pratique" de la violence. C'est pourquoi "vaincre" la violence doit constituer une stratégie oecuménique claire et l'élément crucial de la Décennie. Jusqu'ici, nous avons admis que la prévention et la médiation sont des moyens efficaces d'anticiper la violence. A ces deux approches, je voudrais ajouter deux domaines de réflexion qui méritent qu'on s'y attarde.

VAINCRE LA VIOLENCE EN DÉFIANT LA COMMUNAUTé

Lorsqu'il s'agit de vaincre la violence, l'édification de la communauté est un élément crucial. La communauté n'est pas seulement une nécessité sociale, elle est avant tout une réalité théologique. L'Eglise, peuple de l'alliance, est envoyée dans le monde pour réaliser la communauté des hommes et des femmes et leur apporter une vie nouvelle en Christ.

1) Dans la conception chrétienne, la communauté est une relation d'alliance entre l'humanité et Dieu. La personne humaine créée à l'image de Dieu est une personne en relation avec Dieu, qui ne peut pas se concevoir en dehors de lui. L'être humain est aussi appelé par Dieu à vivre avec les autres, dans une relation d'amour et de confiance mutuels. Dieu a créé les humains pour qu'ils vivent en communauté; nous sommes liés les uns aux autres à l'intérieur d'une communauté, responsables les uns envers les autres. C'est pourquoi nous sommes interdépendants et indissolublement liés les uns aux autres, si bien que si quelqu'un souffre, tous souffrent avec lui. La non-violence est enracinée au plus profond de cette communauté. La violence est la force mauvaise qui détruit les valeurs évangéliques, brise les relations de confiance et de partage et désintègre la communauté en séparant les humains de Dieu et de leurs semblables. C'est pourquoi l’édification de la communauté nous permet de vaincre la violence.

2) Si la communauté est synonyme d'identité, elle implique aussi la diversité. Une affirmation agressive de l'identité débouche sur le refus d'accepter les différences. Une telle approche peut engendrer le fondamentalisme, l'exclusion, l'ethnocentrisme et la violence. Dans l'édification de la communauté, l'identité et la diversité doivent être sauvegardées au même titre et s'enrichir par leurs rapports dynamiques. L'unité est le fruit de cette interaction créatrice, la violence résulte de l'absence de celle-ci. L'élimination de la violence exige l'engagement actif de tous les secteurs de la société pour jeter des ponts et opérer la réconciliation. Les communautés ou groupes de communautés entraînés dans des situations de conflit doivent faire en sorte de retrouver la possibilité de vivre ensemble. Il s'agit de dépasser la simple coexistence pour réaliser une communauté où les différences soient respectées et la confiance mutuelle renforcée. Pour vivre en communauté, nous devons nous accepter les uns les autres tels que nous sommes.

3) Pour vaincre la violence, tous les membres de la communauté doivent participer de plein droit et activement aux structures et processus de prise de décisions. En fait, là où se trouvent une minorité dominante et une majorité opprimée, il n'y a pas de communauté. Pour vivre dans la paix, nous devons vivre dans la justice. Les valeurs démocratiques, qui affirment les droits des peuples à la participation, à la dignité et à l'égalité, doivent inspirer la vie de nos sociétés.

4) La communauté ne consiste pas seulement à vivre ensemble en un lieu, mais aussi à partager des valeurs et des traditions communes et à apprendre les uns des autres. La communauté donne une identité commune, offre la sécurité et assure la justice à tous. C'est pourquoi elle est la négation même de la violence. Une communauté étayée par la responsabilité et la confiance mutuelles, par des préoccupations et une vision communes constitue un moyen sûr d'éliminer la violence. La réalisation d'une communauté est un processus de guérison: elle incite à accepter la communauté, à transformer les structures et à changer les coeurs et se traduit par la victoire sur la violence.

5) Construire une communauté, c'est aussi conscientiser. L'éducation au sein des Eglises et dans la société civile est indispensable pour vaincre la violence. Les Eglises et les membres de la société civile doivent être vigilants et mettre les gouvernements en demeure de faire de l'éducation une priorité majeure.

a) Souvent, les gens sont conditionnés par la violence et n'ont pas conscience de sa nature mauvaise et de ses conséquences destructrices. La famille et l'école peuvent jouer un rôle crucial dans la conscientisation. La famille, institution sacrée, est "une Eglise en miniature". C'est dans la famille que débutent l'éducation générale et la formation chrétienne. Dans certaines de nos Eglises, l'école de la communauté constitue en quelque sorte "l'annexe" de l'Eglise. L'éducation religieuse doit avoir une place centrale dans les divers aspects de la vie d'une école. Ces deux institutions clés de la vie en communauté qui, pour diverses raisons, ont perdu de leur importance dans de nombreuses sociétés, doivent bénéficier de toute notre attention pour devenir des instruments fondamentaux du processus de conscientisation.

b) La violence résulte souvent de la mémoire collective, enracinée dans l'histoire. Nous ne pouvons pas changer l'histoire, pas plus que nous pouvons ignorer la mémoire collective des nations. Pourtant, comment tirer la leçon du passé ? Comment faire de nos expériences amères et de nos tristes souvenirs des sources de conscientisation et de renouveau pour les générations à venir ? Nous pouvons transformer notre passé de violence en ayant le courage de confesser nos erreurs et de pardonner. Après avoir pansé les plaies du passé, il nous sera beaucoup plus facile d'édifier l'avenir.

c) L'égoïsme individuel et l'ethnocentrisme collectif engendrent la violence due au sentiment d'être menacé et la crainte de l'insécurité. Comment l'éducation peut-elle transformer cette violence en acceptation mutuelle, l'insécurité en confiance réciproque, la haine en amour ? En d'autres termes, comment l'éducation peut-elle libérer de la crainte et de la haine ceux qui sont enfermés dans la violence ? L'éducation doit avoir pour objectif de donner aux gens privés de pouvoir la faculté de résister aux valeurs et aux structures qui engendrent l'injustice, l'insécurité et la violence. L'éducation doit porter notamment sur le bon usage du pouvoir. Celui-ci est ambigu et peut être à la fois source de mal et source de progrès. Comment utiliser le pouvoir dans l'intérêt de la justice, des droits de l'homme et de la dignité ? Voilà un problème délicat auquel le mouvement oecuménique devrait continuer à accorder son attention.

d) Bon nombre de systèmes et de méthodes d'éducation, y compris ceux que les Eglises appliquent, engendrent la violence. Il convient de les transformer et de les modifier radicalement. C'est là un processus long et ardu, qui doit être entrepris par les Etats, les Eglises et les ONG. Les mass media, dominés par la culture de la violence, pourraient devenir un instrument pédagogique essentiel en vue de vaincre la violence.

VAINCRE LA VIOLENCE EN BÂTISSANT LA PAIX

Pour prévenir la violence, il est fondamental de mettre en place une culture de paix. Les Etats et les sociétés investissent plus d’argent dans des systèmes et des initiatives qui alimentent la violence que dans des processus visant à promouvoir la justice et la paix. Pour combattre la violence, il est absolument essentiel d’édifier la paix. Pour l’édification de la paix, une responsabilité particulière incombe à la communauté internationale (les gouvernements, les organisations intergouvernementales, les institutions financières internationales, les sociétés transnationales, les médias et la société civile). La perspective d’un monde de justice et de paix occupe une place centrale dans l’Evangile : c’est par elles que le règne de Dieu doit s’établir dans l’histoire. La justice et la paix sont des dons de Dieu ; mais ce sont en même temps des tâches que doit assumer l’Eglise, signe eschatologique du règne de Dieu dans le monde. L’Eglise n’est pas seulement une koinonia de paix mais aussi une koinonia qui s’implique dans la recherche d’une paix juste. Quelle est la vocation de l’Eglise ?

1) Depuis sa première Assemblée, le COE souligne la nécessité de poursuivre l’objectif de la paix et de la justice. Les Assemblées de Nairobi et de Vancouver ont appelé les sociétés à « vivre sans la protection des armements ».5 Le Rassemblement « JPSC » a parlé de « démilitariser les relations internationales » et de promouvoir « des formes non violentes de défense » 6. Lors de sa réunion de Johannesburg en 1994, le Comité central a rappelé la nécessité urgente de vaincre la violence « en élaborant de nouvelles approches théologiques en accord avec les enseignements du Christ, qui ne partent pas de la guerre pour aboutir à la paix mais se fondent sur le besoin de justice »7 Nous avons mis en place des instruments de diaconie pour venir en aide aux victimes de la violence ; nous avons condamné la pratique du recours à la violence ; nous avons proposé des analyses théologiques de la violence. Maintenant, il nous faut élaborer une culture de la paix, ainsi que l’a exprimé l’Assemblée de Harare, en « développant des méthodes appropriées pour le règlement des conflits et l’instauration d’une paix juste, dans le contexte nouveau né de la mondialisation » 8. Face à la violence, nous devons prendre une part active à l’édification de la paix. Quelles sont les conditions et les implications d’une tâche aussi complexe ?

2) L’éducation et l’édification de la communauté ne suffisent pas à éliminer la violence; il nous faut aussi oeuvrer pour la justice. L’injustice socio-économique et l’oppression politique sont sources de violence. L’une des conditions préalables à l’élimination de la violence est la répartition équitable du pouvoir et des ressources. Oui bien sûr, il nous faut dire : « Plus de violence, arrêtez la violence! » Mais il nous faut dire aussi : « Justice pour tous ! » La paix, ce n’est pas seulement l’absence de violence, c’est la présence de la justice. Il ne peut y avoir de paix sans justice. Etablir la paix est un processus long et complexe, ce n’est pas seulement obtenir un cessez-le-feu ou conclure un accord politique. Comment les Eglises peuvent-elles, comme on l’a dit à Séoul, amener les sociétés à passer de la doctrine de la guerre juste à une doctrine de la paix juste ? Voilà une importante tâche qui se présente aux Eglises.

3) Edifier la paix est un élément constitutif du ministère de l’Eglise. « Recherche la paix et poursuis-la ! » (Ps 34, 15). Pour les chrétiens, les aspects essentiels qui concourent à l’édification de la paix sont : l’amour de l’ennemi, la réconciliation, la guérison, l’établissement d’un climat de confiance, la destruction des murs de séparation et l’opposition à la violence sous des formes qui puissent amener l’ennemi à la conversion. Il faut que les Eglises et le mouvement oecuménique élaborent une théologie de l’édification de la paix qui attribue à l’Eglise un rôle particulier pour la transformation des conflits et l’instauration d’une paix juste. Cette théologie devra se fonder sur la repentance et le pardon, la vérité et la justice. Je suis convaincu que les Eglises peuvent également apporter une contribution importante à l’édification de la paix en élaborant des stratégies efficaces de prévention et de médiation. Partager les souffrances des autres, intercéder les uns pour les autres et faire preuve de solidarité -- tout cela renforcera sans doute la lutte commune des Eglises pour la paix.

4) La paix à laquelle nous travaillons n’est pas oeuvre humaine; c’est un don et un appel de Dieu : « Je vous donne ma paix » (Jn 14, 27). La paix que le Christ a donnée n’est pas « à la manière du monde » (Jn 14, 27) ; elle se fonde sur le salut, c’est le don du salut apporté par Jésus-Christ. Ainsi, la paix donnée par Dieu en Jésus-Christ ne nous appartient pas. Dieu nous a donné pour mission d’édifier la paix, et c’est à Dieu que nous devrons rendre des comptes. En annonçant la naissance de Jésus-Christ, les anges la présentèrent comme l’incarnation de la paix. Edifier la paix n’est pas une fonction de l’Eglise parmi d’autres : c’est l’esse de l’existence et du devenir de l’Eglise. Etre le peuple de Dieu, cela signifie incarner le message de paix et de réconciliation : « Ceux qui font oeuvre de paix [...] seront appelés fils de Dieu » (Mt 5, 9).

5) La justice et la paix sont liées entre elles. Dans la perspective chrétienne, il ne s’agit pas d’une question méthodologique ou stratégique, c’est une réalité ontologique. Il nous faut élaborer des modèles d’édification de la paix qui reflètent ce lien. On ne réussira pas à instaurer la paix si on ne s’attaque pas à la cause profonde de la violence, l’injustice. Si on veut que survivent l’humanité et la création, il faut mettre un terme à la violence. Et on ne peut arrêter la violence qu’en établissant la justice et la réconciliation entre les êtres humains et entre l’humanité et la création. La paix n’est pas quelque chose qu’on peut imposer, il faut qu’elle naisse dans la vie de la communauté. Vaincre la violence n’est pas une stratégie : la stratégie des chrétiens, c’est l’établissement de la paix. Ce que font les Eglises pour établir la paix doit relever plus de la prévention que de la thérapie ; cela veut dire que l’Eglise doit s’efforcer d’élaborer une culture qui engendre la justice, l’égalité, la participation et la responsabilité mutuelle. Seule une telle culture pourra devenir une culture de paix. L’édification d’une culture de paix commence au niveau de la communauté locale.

VAINCRE LA VIOLENCE - UN PROCESSUS DE TRANSFORMATION

Pour vaincre la violence, résister ne suffit pas ; la résistance est une réaction à court terme dont l’objectif premier est l’autodéfense, la survie. Si on veut véritablement vaincre la violence, il faut s’engager dans un processus de transformation. En fait, la transformation est l’action de Dieu en Jésus-Christ pour la libération de l’humanité et la re-création de la vie. Signe et anticipation du Royaume, l’Eglise doit devenir l’agent de l’économie divine de transformation en incarnant en ce monde la grâce réconciliatrice, guérissante et libératrice de Dieu.

1) Dieu s’est incarné en Jésus-Christ pour libérer les êtres humains de l’injustice, du péché, du mal et de la mort et pour les amener à la vraie vie en Dieu. La libération de l’humanité et de la création, c’est le salut, et le salut est re-création. Pour rendre cette libération effective, il faut que l’Eglise prenne conscience de la nécessité de changer ; elle doit encourager la capacité à transformer l’ordre donné et soutenir la lutte des peuples pour la justice et la dignité ainsi que pour des formes de gouvernement et de structures socio-économiques fondées sur la justice et la participation. La libération ne détruit pas les structures, elle les renouvelle et les transforme ; elle n’annihile pas l’ennemi, elle change l’image qu’on s’en fait ; elle n’élimine pas les diversités, elle crée une société dans laquelle tous vivent en harmonie. Ainsi considérée, la libération n’est ni résistance, ni réaction : c’est une révolution non violente. Etre chrétien implique, radicalement, qu’on donne son appui et qu’on participe à la lutte pour la libération. En fait, « Voici, je fais toutes choses nouvelles » (Ap 21, 5) est un appel à participer activement à un processus permanent de libération et d’humanisation qui a été inauguré par Jésus-Christ. Nous ne pouvons pas détruire la violence mais, si nous suivons l’Evangile, nous pouvons la transformer en un signe de libération et de conversion.

2) La violence menace non seulement la qualité et l’intégrité de la vie mais aussi la vie elle-même ; elle est rejet de la vie. S’opposer à la violence signifie se battre pour la vie. Voici quelques éléments qui doivent retenir notre attention : a) La vie est un don de Dieu, ce n’est pas quelque chose qui appartient aux êtres humains. Faire violence à la vie est un péché contre Dieu. Affirmer la vie, c’est refuser la violence. La violence détruit la vie, alors que la non-violence la favorise. La non-violence préserve le caractère sacré et inviolable de la vie. Voilà, en vérité, une affirmation biblique primordiale. b) La vie humaine n’est pas simplement l’existence, elle a un but. La vie doit être vécue pour le Royaume. Il faut que les valeurs du Royaume à la fois sous-tendent et orientent la vie humaine. Ainsi considérée, la vie devrait devenir une résistance non violente permanente contre le mal, « contre les Autorités et Pouvoirs » (Ep 6, 12) de ce monde. La résistance dans la foi est une dimension essentielle de la vie chrétienne. c) La vie humaine n’est pas une réalité statique, c’est un processus, un processus d’accomplissement. Les êtres humains sont appelés à développer leur vie pour atteindre à plus de plénitude, d’intégralité. Devenir ainsi pleinement et authentiquement humain est un processus spirituel qui affirme le bien face au mal, la justice face à l’injustice, la non-violence face à la violence. d) Il n’y a pas de vie sans relations ; la vie humaine est partie intégrante de la création. Aussi nous faut-il avoir une conception globale de la vie. La violence que nous infligeons aux autres est une violence dirigée contre nous-mêmes et contre la création, et la violence dirigée contre nous-mêmes et contre la création est une violence infligée aux autres. Vaincre la violence signifie préserver le caractère sacré, l’intégralité et la plénitude de la vie et sauvegarder la création.

3) Il faut que la force de la violence recule devant le pouvoir de la vie. Les Eglises sont appelées à transformer les structures, les systèmes et les comportements qui font obstacle à la fidélité de l’Eglise à la vision divine de la vie, révélée dans l’Evangile de Jésus-Christ. L’Eglise n’existe pas pour elle-même, mais pour participer à la libération, à la transformation et à la puissance vivifiante de Dieu en Christ. La transformation implique la victoire de la vie sur la mort, du non-pouvoir sur le pouvoir. Comment faire pour que les sociétés prennent conscience du caractère sacré de la vie ? Comment lancer des processus de conscientisation afin de communiquer cette vérité : la vie humaine a un sens, et il faut préserver la qualité de la vie ? Comment, à notre époque marquée par la mondialisation, pouvons-nous faire comprendre la valeur de chaque personne en créant un environnement favorisant l’épanouissement de la vie humaine ? Si nous y arrivions, nous pourrions considérablement renforcer notre résistance non violente. Le mouvement oecuménique devrait appeler les Eglises à élaborer une théologie qui affirme la vie et qui transforme la violence.

LA VIOLENCE EN « DERNIER RECOURS » ?

J’en arrive maintenant à la partie la plus délicate de mon rapport. La question brûlante est celle-ci : mise au service d’une cause juste, la violence peut-elle se justifier ?

1) La question du recours à la violence pour servir la justice a toujours été au coeur de la discussion oecuménique sur la violence et la non-violence. Les Eglises n’ont pas réussi à trouver un terrain d’entente sur cette question. Certaines ont avancé les critères de la « guerre juste », selon lesquels une guerre devrait servir une cause juste, viser à une paix juste ; elle ne devrait être entreprise par une autorité légitime qu’en dernier recours, et elle devrait avoir des perspectives raisonnables de succès. Les Eglises traditionnellement pacifistes ont toujours considéré que tout recours à la violence était contraire aux commandements du Christ. La Première Assemblée du COE a exprimé de sérieux doutes quant à la possibilité d’appliquer les critères de la « guerre juste ». En 1948, il n’a pas été possible d’arriver à un accord sur cette question ; et, chaque fois qu’elle s’est posée ou qu’un conflit s’est produit, le Conseil s’est trouvé dans une situation difficile en raison des positions divergentes des Eglises. Cette question est revenue au premier plan du débat oecuménique pendant la guerre du Golfe et, récemment encore, lorsque l’OTAN a bombardé la Yougoslavie. La légitimité de la violence, même lorsque celle-ci est employée par un Etat pour combatre l’injustice, demeure une question non résolue.

2) Au cours de la présente réunion, le Comité central se prononcera sur un document intitulé : « L’emploi de la force armée à l’appui d’objectifs humanitaires -- Point de vue éthique du Conseil oecuménique des Eglises ». En 1995, le Comité central a adopté un texte intitulé « Mémoire et recommandations sur l’application de sanctions ». En 1999, il a approuvé un « Mémorandum et recommandations sur la sécurité internationale et les mesures à prendre face aux conflits armés » ; ce document affirmait que, la guerre froide étant terminée, il fallait adopter des positions nouvelles à l’égard de la paix et de la sécurité internationales, et il soulignait un certain nombre de nouveaux problèmes moraux et éthiques que pose le concept d’« intervention humanitaire ». Le nouveau document d’étude marque une étape supplémentaire de la réflexion oecuménique sur le recours à la force armée dans les relations internationales. Durant la préparation de ce document, le Conseil a été confronté à d’énormes difficultés et de graves dilemmes. Comment, d’une part, la communauté internationale peut-elle assumer la responsabilité qu’elle a de protéger les populations civiles dont les droits fondamentaux sont gravement bafoués, et comment, d’autre part, peut-elle éviter de recourir à la violence ? Comment distinguer, dans le cas de l’intervention humanitaire, les intérêts économiques et stratégiques à long terme d’un Etat puissant et l’objectif limité à court terme ? Un autre problème est celui de l’efficacité : après l’intervention, les droits de la personne seront-ils mieux protégés, ou la légitimité sera-t-elle restaurée ? En outre, qui demande cette intervention, et qui a le droit d’intervenir ? Quelles sont les implications de l’intervention du point de vue de la souveraineté nationale, de l’autorité de l’ONU et du droit international ? La discussion de ces questions a amené ceux qui étaient chargés de préparer ce document à faire remarquer que, premièrement, « l’emploi de la force militaire meurtrière n’est pas un acte humanitaire » ; en effet, une action humanitaire implique des « notions d’humanité, de neutralité, d’impartialité et d’universalité » et elle a pour objectif de secourir des populations en danger. En second lieu, l’intervention militaire ne devrait pas être considérée de façon isolée, mais comme « un des nombreux moyens d’action possibles, qui vont de l’assistance humanitaire à l’emploi, en dernier recours, d’une certaine force armée, en passant par les pressions diplomatiques et les sanctions économiques ». Troisièmement, la force armée « ne devrait être employée que dans des circonstances exceptionnelles et extrêmement graves lorsqu'elle est nécessaire, en dernier recours, pour secourir et protéger des populations gravement menacées »9. On a ainsi l’impression que, dans certaines circonstances, le mouvement oecuménique soutient l’emploi de la force militaire pour sauver des vies humaines et pour établir la justice. Je crois qu’il y a toujours confusion, ambiguïté et dilemme : comment définir exactement la ligne de partage entre l’emploi légitime de la force et son application immorale et injuste ? Quelles devraient être la nature et la portée de ce qu’on appelle l’« intervention humanitaire » ?

3) Il arrive souvent que la violence et la non-violence agissent l’une sur l’autre ; elles sont étroitement liées. Le colloque de Cardiff n’a pas été en mesure de « recommander a priori ou dans l’abstrait s’il faudrait employer l’action violente ou l’action non violente dans une situation particulière »10. Il nous faut dépasser la dichotomie entre violence et non-violence et nous placer dans un contexte plus large. Bien évidemment, l’option chrétienne est la non-violence active. Notre force vient de la croix et non du glaive, de l’amour et non de la haine, de la non violence et non de la violence. Mais la croix n’est pas la fin : nous avons la résurrection, la victoire de la vie qui a été obtenue sur la croix. La violence est un mal. Cependant, pour certains qui sont victimes de l’oppression et de l’injustice, lorsqu’ont été épuisés tous les moyens d’action non violente, la violence demeure une option inévitable, un dernier recours. Ne faudrait-il donc pas, pour échapper à ce dilemme entre violence et non-violence, non pas les opposer mais, au contraire, les rapprocher ? La révolte en Palestine, après tant d’années d’action non violente et de patientes négociations, n’est-elle pas un exemple supplémentaire de « la violence en dernier recours » ? Bien entendu, il ne saurait être question de légitimer la violence dans n’importe quelle situation ; mais nous ne pouvons pas non plus condamner la violence lorsqu’elle est employée « en dernier recours » au service de la justice et de la dignité humaine.

4) Il apparaît donc qu’une violence « limitée et contrôlée » qui a pour objectif de transformer les conditions sociales et d’établir la justice pour tous11 est acceptable et même nécessaire ; elle est partie intégrante du processus de libération. Certains vont même jusqu’à parler de « violence rédemptrice ». Il ne s’agit pas de généraliser ce genre de violence : elle doit être employée dans un contexte limité, pour défendre la justice, et en dernier recours. Il faut bien remarquer que si, pour certains, une violence « limitée et contrôlée » mise au service d’une « bonne cause » est une source de libération, elle est, pour d’autres, une source d’esclavage. Ces derniers affirment en effet que la vie et l’enseignement du Christ excluent le recours à toute forme de violence physique, et ils rejettent par avance tout recours à la violence, quelles que soient les circonstances. Le dilemme demeure. Pouvons-nous faire de la non- violence une valeur absolue ? Jésus n’a pas dit qu’il ne faut pas résister au mal. Il a dit qu’il ne faut pas rendre le mal pour le mal. Il s’agit alors de savoir dans quelles conditions il faudrait combattre le mal -- non pas si il faut le combattre mais comment le combattre. Nous ne pouvons pas choisir de rester passifs mais de résister à l’injustice. Résister, c’est d’abord refuser de collaborer avec l’injustice et s’engager résolument au service de la justice. En 1971, le Comité central a déclaré qu’il « ne porte pas non plus de jugement sur les victimes du racisme contraintes à la violence, seul moyen qui leur reste pour redresser les injustices et ouvrir ainsi la voie à un ordre social nouveau et plus juste »12. En 1973, le Comité central a dit qu’il y avait trois points de vue : « l’action non violente, seule option conforme à l’obéissance à Jésus-Christ » ; la résistance non violente, qui est un « devoir chrétien dans des circonstances extrêmes » ; et la « situation de violence à laquelle ils ne peuvent faire autrement que de participer »13. Pouvons-nous définir, pour vaincre la violence, une orientation éthique qui soit fidèle à l’Evangile et qui, en même temps, soit réaliste et praticable ? Y a-t-il d’autres « recours » qui puissent être mis en oeuvre avant d’en venir au « dernier recours » ? Le Parlement des religions mondiales a déclaré : « Partout où ceux qui dirigent menacent de réprimer ceux qu’ils dirigent, partout où des institutions menacent des personnes et partout où la force opprime le droit, nous avons l’obligation de résister -- autant que possible de façon non violente ».

BERLIN ÉVOQUE DES SOUVENIRS

Pour la première fois, nous nous réunissons dans la ville de Berlin réunifiée, dans cette ville historique qui a joué un rôle essentiel dans la formation et la transformation de l’Europe. En fait, Berlin évoque bien des souvenirs…

Pour l’Europe, la ville évoque des souvenirs de divisions et d’histoires divisées. Mais elle évoque aussi des souvenirs pour le reste du monde. En fait, le Mur de Berlin, qui séparait l’Est et l’Ouest, était la marque la plus visible des rivalités idéologiques et politiques qui se répercutaient sur la vie de millions de gens, et jusqu’aux extrémités de la terre.

Mais, pour d’autres, Berlin évoque des souvenirs qui remontent à plus d’un siècle : la Conférence de Berlin, en 1884-1885, marqua l’apogée de la ruée de l’Europe sur l’Afrique : lors de cette conférence, l’Afrique fut divisée d’une manière qui a radicalement changé la face du continent et le sort de ses habitants. La Grande-Bretagne, la France, l’Allemagne, le Portugal, l’Italie, l’Espagne et la Belgique se divisèrent l’Afrique comme un gâteau, chaque pays en prenant une ou plusieurs parts, ignorant totalement le bien-être et les droits de la population africaine. La division de l’Afrique ne fit qu’accélérer la colonisation et toute la violence qu’elle impliquait.

Berlin évoque aussi le souvenir de la façon dont, par la non-violence active, le pouvoir populaire peut abattre le « mur de séparation ».

Tel fut notre cheminement oecuménique pour la paix juste, d’Amsterdam à Berlin, cheminement long et difficile, mais où nous fûmes soutenus par la foi, l’espérance et la conviction.

LA DVV : UN PROCESSUS D’ACTION AU SERVICE DE LA PERSONNE HUMAINE

Alors que nous nous apprêtons à lancer la Décennie « vaincre la violence », il importe de prendre en considération les éléments suivants :

1) En tout premier lieu, il faudrait que, au cours de cette Décennie, soit lancé un processus de réflexion théologique novatrice sur la violence. Il faut que l’engagement des Eglises en faveur de la non-violence soit étayé par une sérieuse discussion théologique. La violence est un grand défi pour la théologie, et elle touche à la substance même de ce que signifie être chrétien dans un monde déchiré par la violence. Il faut que les Eglises aillent au-delà des arguments simplistes et superficiels pour soulever des questions théologiques de fond. Il nous faut analyser la violence dans des perspectives contextuelles et pluriculturelles, et nous interroger plus avant sur ses ambiguïtés et ses paradoxes. Il nous faut reformuler, redéfinir et réexprimer nos points de vue sur la violence. Il nous faut réfléchir plus avant sur l’identité, l’unité et la diversité considérées comme des ressources de non-violence ; et il nous faut aussi approfondir notre réflexion sur le nationalisme et l’identité ethnique considérés comme sources potentielles de violence. En d’autres termes, il nous faut essayer d’arriver à une conception globale de la violence et, pour ce faire, en étudier les causes. Cela dit, une approche théologique, quelle qu’elle soit, n’a aucun sens si elle ne tient pas compte des réalités concrètes. La théologie a trait non seulement à ce qu’est l’Eglise, mais aussi à son devenir, et ces deux aspects son liés. Et la relation entre l’ecclésiologie et l’éthique est en rapport direct avec le problème de la violence. Aussi nous faut-il dégager des approches et modèles théologiques nouveaux sur le rapport entre violence et non-violence.

2) Au cours de cette Décennie, il faudrait faire un sérieux effort pour dépasser le plan de la simple réflexion et élaborer des processus et programmes qui débouchent sur l’action : c’est ce qui, à mon avis, devrait caractériser cette Décennie. Celle-ci devrait offrir aux Eglises un lieu de rencontre où elles puissent se faire mutuellement part de leur vécu et de leur expérience, créer des relations et des liens de partenariat et apprendre les unes des autres. En outre, elle devrait inciter les Eglises à participer à une interaction existentielle qui les orientera vers une action commune.

3) La violence a de nombreux aspects, elle revêt de multiples formes et comporte de multiples dimensions ; aussi notre approche doit-elle être globale. Dans un sens, le processus de cette Décennie n’est pas quelque chose de nouveau. Comme je l’ai fait remarquer, grâce en particulier au processus « JPSC », à la Décennie de la Femme et au Programme de lutte contre la violence, le COE a acquis, au cours de ces dix dernières années, une précieuse expérience qui lui a permis d’entreprendre des réflexions théologiques d’un genre nouveau et d’établir, dans le domaine de la construction de la paix, de nouvelles relations et collaborations. Il convient maintenant de relancer ce processus. Je suis convaincu que les études sur l’ecclésiologie et l’éthique, sur la théologie de la vie et sur le nationalisme et l’identité ethnique pourraient fournir à cette Décennie des points de vue novateurs et ouvrir de nouvelles perspectives.

4) Considérant les dimensions de cette entreprise globale, il faut que le mouvement oecuménique reconnaisse ses limites et ses limitations. La violence est une réalité complexe, et tout ce que l’on pourra essayer de faire pour vaincre la violence sera plus complexe encore et très long à réaliser. C’est un processus dont les implications politiques, sociales et financières vont très loin. Aussi ne faudrait-il pas proposer des programmes ou avancer des prétentions irréalistes. Tout en restant fidèles aux impératifs de notre foi et en soutenant fermement les objectifs de cette Décennie, il nous faut rester conscients de la mesure limitée de nos ressources humaines et financières.

5) La DVV doit exprimer clairement ce que cette initiative a de particulier. La non-violence n’est pas une option exclusivement chrétienne. Quel est alors le caractère particulier de l’engagement commun des Eglises en faveur de la non-violence active ? Quelles sont les implications de cet engagement pour leur conception ecclésiologique et leur activité missionnaire ? Ces questions devront recevoir toute l’attention qui leur est due dans tous les aspects et à tous les stades de ce processus.

6) S’il s’agit bien d’une initiative mondiale, la DVV n’en doit pas moins se refléter au niveau local. Ses questions, ses exigences, ses objectifs et sa perspective doivent s’exprimer dans des contextes culturels, socio-économiques et politico-religieux différents. Cette Décennie devrait s’enraciner dans les expériences et attentes existentielles des communautés locales. Il faut que les programmes et actions conçus au niveau mondial aient pour fondements ce qui se fait au niveau local. Il faut que les communautés locales en soient les principaux acteurs et les destinataires prioritaires. Il faut provoquer une interaction dynamique entre, d’une part, les expériences et les points de vue locaux et, d’autre part, les expériences et points de vue mondiaux. Une approche de ce genre exigera des méthodes et modes de travail particuliers.

7) Au cours de cette Décennie, il faudra établir un dialogue novateur avec d’autres religions ainsi qu’avec la société civile dans son ensemble : nous ne pouvons pas en méconnaître la dimension interreligieuse. A différentes occasions, les religions mondiales ont exprimé clairement leur volonté de promouvoir une culture de la non-violence. Dans toute initiative destinée à combattre la violence, il est absolument essentiel de collaborer sur la base de valeurs, aspirations et objectifs communs. Je crois que nous pouvons établir une collaboration fructueuse avec d’autres religions dans le domaine de l’éthique universelle qui, au cours de ces dix dernières années, a pris une place centrale dans le mouvement oecuménique et dans le dialogue entre les religions. Il faudrait en outre que le mouvement oecuménique s’efforce de collaborer avec les principaux acteurs de la société civile en créant de nouveaux réseaux et en établissant de nouvelles alliances et de nouveaux systèmes de défense des causes. En d’autres termes, il faut donner clairement la priorité au travail interreligieux, intercommunautaire et interculturel.

8) La DVV n’est pas un programme, c’est une initiative de l’ensemble du Conseil oecuménique des Eglises. Ce n’est pas non plus, à strictement parler, une démarche propre au COE mais une démarche des Eglises, et c’est la raison pour laquelle les Eglises doivent y participer activement ; ce sont elles qui devraient en être les actrices principales. Le Conseil suivra de près l’évolution de ce processus en regroupant en un tout cohérent les différentes expériences et initiatives, réflexions et actions et en précisant ses objectifs. Il faudrait que les Eglises apportent leur appui total à cette Décennie en lui consacrant leurs ressources morales, humaines et financières. En outre, je pense que le COE devrait créer un fonds spécial (dans le genre, par exemple, du Programme de lutte contre le racisme) pour vaincre la violence.

La violence sape l’intégrité, affecte l’unité et remet en cause la crédibilité de l’Eglise. L’an dernier, dans notre Lettre aux Eglises, nous disions : « Nous devons confesser que nous en [les drames] sommes souvent les témoins passifs et parfois même que nous y participons », et nous appelions les Eglises à « apporter au monde un clair témoignage de paix, de réconciliation et de non-violence, fondée sur la justice »14. Le processus de la Décennie « vaincre la violence » ne sera pas facile : il devra affronter d’énormes difficultés, aborder des questions fondamentales ; il sera confronté à des incertitudes et à des polarisations ; les risques ne manqueront pas, mais l’espérance non plus.

La violence a accompagné Jésus-Christ jusqu’à la croix. Elle nous accompagnera aussi jusqu’à l’instauration complète du Royaume de Dieu. La DVV est une occasion d’agir, un rappel, un impératif et un défi. L’action non violente active est une martyria dans la vie, et elle peut même se terminer par une martyria dans la mort. C’est la voie des chrétiens. Sommes-nous prêts à lancer cette Décennie avec cette ferme conviction ? Ne prétendons pas être capables de détruire la violence ; mais engageons-nous résolument à la vaincre par les moyens de l’éducation, de la prévention, de l’édification de la communauté et de l’instauration de la paix. Pour vaincre la violence, nos ressources ultimes demeurent la foi et l’espérance. Par la Décennie « vaincre la violence », nous sommes appelés à témoigner de l’Evangile de façon courageuse et responsible, car c’est la source de notre foi et de notre espérance. Il ne faut pas que nous perdions ce kairos oecuménique.

ARAM Ier, Catholicos de Cilicie
JANVIER 2001, ANTÉLIAS, LIBAN

Notes

  1. L’heure est venue, Rassemblement mondial sur la justice, la paix et la sauvegarde de la création, 1990, COE, Genève, p. 27 ss.
  2. Procès-Verbal du Comité central 1994, p. 113
  3. On lira avec profit l’ouvrage de Margot Kässmann : Overcoming Violence -- the Challenge to the Churches (COE, Genève 1998), résumé analytique du débat oecuménique sur la violence.
  4. Minutes of the Central Committee 1999, p. 188
  5. Publié sous la direction de Marcel Hennier : Briser les barrièves, Nairobi 1975, Section V : « Structures d’injustice »
  6. L’heure est venue, p. 29
  7. Minutes of the Central Committee 1994, p. 113
  8. Faisons route ensemble, Harare 1998, p. 251
  9. L’emploi de la force armée à l’appui d’objectifs humanitaires - Point de vue éthique du Conseil oecuménique des Eglises, (document CC01 Pl 2)
  10. Violence, Nonviolence and Civil Conflict, The Report of the Corrymeela Consultation, 7-11 March 1983, WCC, Geneva, p. 21
  11. Ibid., p. 10
  12. Procès-Verbal du Comité central 1971, p. 64
  13. Minutes of the Central Committee 1973, pp. 28-29
  14. Minutes of the Central Committee 1999, pp 185.187

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