Numéro 1
Juin 2005

Chers frères et sœurs en Christ,
Paix et salutations depuis Genève !

J’ai le grand plaisir de vous communiquer, dans ce numéro, certains documents publiés à l’occasion d’événements récents et qui éclairent notre mandat de proclamer œcuméniquement la toujours bonne nouvelle de l’Evangile.

Le premier de ces événements fut l’Ecole de l’évangélisation qui s’est tenue à Suva (Fidji), du 10 au 16 novembre 2004, pour les Eglises de la région du Pacifique. Vous trouverez ci-après la lettre intitulée « Proclamer l’Evangile dans le Pacifique », qui a été envoyée aux Eglises de cette région.

Bien entendu, nous allons commencer à publier dans la Lettre œcuménique sur l’évangélisation toute une série de documents en rapport avec la Conférence mondiale sur la mission et l'évangélisation qui s’est tenue à Athènes du 9 au 16 mai et dont le thème était : « Viens, Esprit Saint, guéris et réconcilie ! – Appelés en Christ à être des communautés de réconciliation et de guérison ». Des informations plus complètes vous seront fournies à propos des différentes « synaxes » (groupes de travail) qui ont été proposées à cette occasion sur le thème de l’évangélisation.

Dans le présent numéro, nous publions la Lettre d’Athènes aux Eglises, que vous trouverez également sur Internet à l’adresse suivante : www.mission2005.org. Nous vous encourageons à parcourir ce site pour y trouver non seulement des informations à propos de la conférence, mais aussi des documents préparatoires ainsi que d’autres documents de base qui peuvent nous aider à proclamer l’Evangile dans une perspective œcuménique. Par ailleurs, en référence à la même conférence, nous résumons un entretien sur le thème de « l’évangélisation holistique » avec Simon Barrow, secrétaire de la Commission des Eglises sur la mission (CCOM) de « Churches Together in Britain and Ireland ».

Enfin, à titre d’information, notre bureau a publié deux documents particulièrement intéressants et utiles pour l’évangélisation : d’une part, un rapport complet de l’Ecole de Fidji, avec des articles utiles ; d’autre part, un document intitulé « Evangelism. A Programme designed for voicing the Gospel ecumenically » (Evangéliser – Un programme pour proclamer l’Evangile œcuméniquement), publié dans la perspective de la Conférence mondiale sur la mission et l’évangélisation. Vous pouvez commander ces deux documents auprès de nous, à l’adresse suivante : Denise Von Arx (dva@wcc-coe.org).

Nous prions le Seigneur qu’il continue à inspirer la mission de guérison et de réconciliation dont il vous a chargés.

Evangélistiquement vôtre
Carlos Emilo Ham (cah@wcc-coe.org)
Chargé du programme « Evangélisation » du COE


L’ECOLE DE LA MISSION – PROCLAMER L’EVANGILE DANS LE PACIFIQUE
Suva (Fidji), 10-16 novembre 2004

L’école de la mission – Proclamer l’Evangile dans le Pacifique s’est tenue du 10 au 16 novembre 2004 au Jovili Meo Mission Center de la Faculté de théologie du Pacifique, à Suva (Fidji).

Le lieu choisi pour cette réunion était idéal : d’une part, Fidji occupe une situation géographique privilégiée dans la région du Pacifique pour ce qui est de la promotion du mouvement œcuménique : c’est là en effet que se trouvent le Secrétariat du COE pour la région du Pacifique, le Bureau de la Conférence des Eglises du Pacifique ainsi que la Faculté de théologie du Pacifique. D’autre part, le centre pour la mission qui s’y est ouvert récemment, le Jovili Meo Mission Center, offrait des conditions idéales pour cette session de l’Ecole de la mission : logistique, salles et équipements de réunion, sans oublier les qualités humaines du personnel de ce centre.

Ce séminaire avait été organisé essentiellement pour étudier et discuter les conceptions bibliques et théologiques de la dimension de la mission relative à l’évangélisation. Nous espérons que les conclusions de cette Ecole seront utiles aux Eglises locales qui s’efforcent de diffuser, dans la joie et dans un esprit œcuménique, la bonne nouvelle de l’Evangile. Ce séminaire nous a donc donné des possibilités de mieux nous former et nous préparer à exécuter ce grand mandat. En qualité de citoyens du Royaume de Dieu, nous sommes appelés à aimer notre Seigneur, à l’adorer et à lui obéir, ainsi qu’à faire connaître l’Evangile à tous dans le monde entier.

Par le passé, la CME et le programme « Mission et évangélisation » du COE ont consacré d’importants efforts et moyens aux écoles de l’évangélisation. Celles-ci ont pour objectif de promouvoir la réflexion sur l’évangélisation authentique et d’intensifier l’engagement de ceux qui sont appelés à la pratiquer. Ces écoles sont organisées aux niveaux national ou régional, en coopération avec les organismes œcuméniques, de façon à permettre aux personnes qui, dans les Eglises, font fonction d’agents multiplicateurs de réfléchir sur leur mandat et leur pratique de l’évangélisation.

Ces dernières années, on a vu proliférer, dans la région du Pacifique, de nouvelles dénominations et de nouveaux mouvements religieux, ce qui a intensifié la tendance au confessionnalisme ; de ce fait, la mission et plus particulièrement l’évangélisation sont devenues des thèmes très sensibles. De nombreuses îles ont été la cible de campagnes d’évangélisation très intenses et agressives de nombreuses Eglises de l’« Ouest » et, si cela a eu de nombreuses retombées positives, cela a aussi créé beaucoup de problèmes avec les Eglises établies : en effet, pour elles, le prosélytisme – reconnu comme « un scandale et un contre-témoignage » – est l’un des défis les plus graves auxquelles elles sont confrontées dans le domaine de la mission.

C’est pourquoi l’une des principales raisons pour lesquelles cette Ecole de l’évangélisation a été organisée dans la région du Pacifique a été précisément la nécessité de rendre les Eglises capables de donner un témoignage commun, d’évangéliser ensemble.

Plusieurs réunions ont permis de préparer soigneusement cette Ecole, avec en particulier Fei Tevi, chargé du programme du COE pour le Pacifique, Gert Ruppel, un collègue d’Ecu-learn (voir http://www.ecu-learn.de) et l’équipe « Evangélisation » du COE. Le succès de cette réunion doit aussi beaucoup à nos collègues Denise von Arx et Malama Toma, notre jeune stagiaire.

Cette Ecole a rassemblé plus de trente participants, représentant différentes dénominations dans les îles suivantes : Samoa américaines, îles Cook, Fidji, Polynésie française, Kiribati, Niue, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Samoa, Tonga, Tuvalu et Vanuatu. Nous avons aussi bénéficié de la participation du pasteur François Pihaatae, membre de la Commission de la CME et pasteur de l’Eglise évangélique de Polynésie française.

“Proclamer l’Evangile dans le Pacifique”
Lettre envoyée aux Eglises par les participants à l’Ecole de la mission,
organisée par le COE à Suva (Fidji), du 10 au 16 novembre 2004

Chers frères et sœurs en Christ,

Nous, frères et sœurs venant de nombreux pays de la région du Pacifique (Samoa américaines, îles Cook, Fidji, Polynésie française, Kiribati, Niue, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Samoa, Tonga, Tuvalu et Vanuatu), représentant nos Eglises respectives, nous sommes rassemblés pour écouter la Parole de Dieu, pour apprendre en nous écoutant les uns les autres et pour essayer de nous aider mutuellement à mieux proclamer l’Evangile dans le Pacifique. L’Ecole de la mission, organisée par le Conseil œcuménique des Eglises (COE), a été pour nous une occasion de nous rapprocher plus étroitement dans la mission du peuple de Dieu pour le peuple de Dieu.

Le principal objectif de ce séminaire était d’étudier et de discuter les conceptions bibliques et théologiques de la dimension de la mission relative à l’évangélisation. Nous espérons que les conclusions de cette Ecole aideront les Eglises locales à diffuser plus efficacement, dans la joie et dans une perspective œcuménique, la bonne nouvelle de l’Evangile. Ce séminaire, qui a eu lieu au Jovili Meo Mission Center, récemment créé dans le cadre de la Faculté de théologie du Pacifique, nous a permis de nous former et nous préparer à exécuter ce grand mandat. En tant que citoyens du Royaume de Dieu, nous sommes appelés à aimer notre Seigneur, à l’adorer et à lui obéir, ainsi qu’à présenter l’Evangile à tous, dans le monde entier.

On nous a rappelé que l’évangélisation, c’est aussi une invitation, une proclamation explicite et délibérée de l’Evangile, un appel au repentir, un appel à une foi ou une conversion personnelle ainsi qu’à une vie nouvelle en Jésus Christ, Seigneur et Sauveur. Nous sommes également appelés à être, dans le monde, des disciples, des témoins et des serviteurs obéissants. Nous réaffirmons qu’il est nécessaire et urgent que l’évangélisation se fasse dans l’unité afin que tout le Corps du Christ se retrouve dans la conception commune que nous sommes au service du même Seigneur. Il a été fait remarquer que, lorsque nous discutons avec des personnes appartenant à d’autres religions, nous devons être conscients de la tension entre deux convictions : d’une part, il n’y a pas d’autre voie de salut que Jésus Christ ; en même temps, nous ne pouvons fixer de limites à la puissance salvatrice de Dieu

  • Au cours de notre réunion, plusieurs interventions ont évoqué les souffrances des personnes qui vivent dans la région du Pacifique, et un certain nombre de questions ont été soulevées, notamment celles-ci :
  • les différentes manières dont la mondialisation menace les cultures et modes de vie communautaire traditionnels ;
  • la répartition inégale des richesses créées par une économie mondialisée qui, souvent, élargit le fossé entre riches et pauvres ;
  • la menace que représentent les changements climatiques, dus essentiellement aux pays très développés, pour l’existence même de nombreuses îles du Pacifique ;
  • les bouleversements produits dans la vie familiale par les décès prématurés dus au VIH/sida ;
  • les perturbations et divisions provoquées, dans les familles et les communautés, par la violence aux niveaux familial, ecclésial et régional.
  • Par ailleurs, l’évolution de la situation nous oblige à réfléchir sur un certain nombre de réalités :
  • On nous a exposé à quel point les nouveaux mouvements religieux se développent rapidement, parfois aux dépens d’Eglises traditionnelles.
  • Il a été question d’une évolution de la culture chez les jeunes et d’une mutation des structures sociales, qui ont parfois des effets destructeurs.
  • Bien des jeunes se sentent marginalisés par les Eglises traditionnelles.
  • Face à ces différents développements, nous appelons les Eglises à réagir sans crainte, à relever les défis qu’elles impliquent et à y trouver autant d’occasions de croître et de transformer leurs structures ecclésiales respectives ou les manières dont chacune exprime sa foi en Jésus Christ. Dans quelle mesure les responsables d’Eglises sont-ils préparés à aborder les problèmes posés par les nouveaux mouvements religieux ?

    Un motif d’encouragement nous a été donné par certaines expériences de coopération et d’édification de communautés qui ont remplacé la « concurrence » entre dénominations et une fragmentation toujours actuelle du Corps du Christ. Nous croyons que la croissance spirituelle des disciples du Christ devrait se prolonger par de nouveaux efforts pour dépasser cette concurrence et cette fragmentation.

    Nous croyons que les individus – et, globalement, les Eglises – sont appelés à refléter l’humilité du Christ et donc à faire en sorte qu’on découvre le Christ en chacun de nous. Pour nous, l’évangélisation ne commence pas par l’évangélisation de l’autre mais par l’évangélisation et la transformation de nous-mêmes. C’est pourquoi nous appelons instamment les Eglises à se rassembler dans l’unité, à croître dans leur compréhension mutuelle et à approfondir leur manière de considérer Jésus Christ. Nous les encourageons à refléter, dans les relations qu’elles entretiennent les unes avec les autres, l’unicité du Corps du Christ.

    On nous a rappelé que notre objectif principal est la croissance du Royaume et non pas seulement la croissance des Eglises. Notre programme d’évangélisation doit être christocentrique plutôt qu’ecclésiocentrique. Nous nous engageons à poursuivre nos efforts dans une perspective œcuménique, au niveau de la communauté locale, et à continuer à apprendre à communiquer les uns avec les autres. En outre, nous nous engageons à coopérer entre nous sur des problèmes qui touchent à la société dans son ensemble et, ce faisant, à refléter des éléments essentiels de l’intégrité du Corps du Christ.

    Dans le cadre de l’Ecole de la mission, nous avons eu l’occasion de réfléchir sur la Décennie « vaincre la violence » organisée par le Conseil œcuménique des Eglises. Ce même cadre a amené les participants à se pencher sur le thème de la Conférence mondiale sur la mission et l'évangélisation : « Viens, Esprit Saint, guéris et réconcilie ! – Appelés en Christ à être des communautés de réconciliation et de guérison », conférence organisée à Athènes (Grèce) en mai 2005.

    Cette Ecole de la mission a été pour nous une expérience de communauté fraternelle, un signe du don de l’unité que nous avons déjà, et elle nous a encouragés à continuer à approfondir notre unité visible afin de mieux servir l’objectif de la mission de Dieu dans le monde. Individuellement et au nom de nos Eglises respectives, nous nous engageons à exécuter le grand mandat qu’il nous a confié – dans notre Eglise, dans notre pays et dans notre région. C’est dans cet esprit que nous vous adressons nos salutations et que nous vous invitons à poursuivre ensemble la mission et l’évangélisation.


    LETTRE D’ATHENES AUX EGLISES, AUX COMMUNAUTES ET AUX RESEAUX CHRETIENS
    Athènes, mai 18, 2005

    Viens, Esprit Saint, guéris et réconcilie !
    Appelés en Christ à être des communautés de réconciliation et de guérison

    (Version adoptée par la Commission de la CME, rédaction finale le 19 mai 2005)

    Chers sœurs et frères en Christ,

    Nous vous saluons d’Athènes, en Grèce. C’est durant la période sainte qui s’écoule entre Pâques et la Pentecôte que nous vous écrivons, ce temps où le Christ ressuscité a préparé ses disciples à recevoir le don de l’Esprit Saint et les a appelés à porter la bonne nouvelle ‘jusqu’aux extrémités de la terre’ (Actes 1,8), en promettant d’être avec eux ‘jusqu’à la fin des temps’ (Matthieu 28,20). Nous étions 600, venus de 105 pays, à nous réunir ici, sur les rives de la mer Egée, à l’invitation de l’Eglise de Grèce et d’autres Eglises en Grèce, pour participer à la 13e Conférence mondiale sur la mission et l’évangélisation (CME) qui s’est tenue du 9 au 16 mai 2005, sous les auspices du Conseil œcuménique des Eglises. Lorsque le soleil s’est levé sur la conférence, un petit bateau est arrivé dans la lumière de l’aube, portant une énorme croix en bois d’olivier, don des Eglises de Jérusalem, signe à la fois de souffrance et d’espérance, une croix faite de fragments d’arbres qui ont été déracinés durant la construction du mur séparant les Palestiniens des Palestiniens et des Israéliens. Nous prions pour que cette croix devienne un signe de réconciliation.

    Cette Conférence mondiale sur la mission et l’évangélisation était la première à se dérouler dans un contexte essentiellement orthodoxe. Les jeunes, bien que beaucoup moins nombreux que prévu, y ont joué un rôle important. Pour la première fois, la Conférence a accueilli parmi ses participants à part entière un nombre significatif de délégués d’Eglises non membres du COE : l’Eglise catholique romaine et plusieurs Eglises et réseaux pentecôtistes et évangéliques. En conséquence, quand nous disons ‘nous’, nous nous référons à un groupe très divers, composé de personnes venues de tous les coins du monde, de nombreux milieux ethniques et culturels, parlant de nombreuses langues et représentant les grandes traditions chrétiennes. Notre thème est une prière : ‘Viens, Esprit Saint, guéris et réconcilie’.

    Par cette lettre, nous aimerions partager avec vous quelques-uns des points de vue et des défis de cette semaine, vous raconter les joies et les peines que nous avons éprouvées. Jour après jour, nous avons cheminé ensemble, même si nous n’étions pas toujours d’accord. Nous sommes en mission, nous tous, parce que nous participons à la mission de Dieu qui nous a envoyés dans un monde fragmenté et brisé. Nous sommes unis dans la conviction que nous sommes ‘appelés en Christ à être des communautés de réconciliation et de guérison’. Nous avons prié ensemble. Nous avons trouvé une aide particulière dans la lecture de l’Ecriture, alors que nous nous efforcions ensemble de discerner où nous conduit l’Esprit qui guérit et réconcilie, dans nos propres contextes, deux mille ans après l’arrivée de saint Paul sur ces rives, porteur de la bonne nouvelle de l’Evangile de Jésus Christ. Nous voulons partager ce voyage avec vous, et vous inviter à le faire vôtre.

    Nous nous trouvons aujourd’hui à un moment particulier de l’histoire de la mission. Même si les centres où s’exerce le pouvoir se situent encore principalement dans le Nord, c’est dans le Sud et dans l’Est que les Eglises connaissent la croissance la plus rapide, qui résulte de la mission et du témoignage fidèles des chrétiens. Le caractère missionnel de l’Eglise apparaît plus divers que jamais, alors que les communautés chrétiennes continuent à chercher des réponses spécifiques à l’Evangile. Cette diversité est stimulante, même si parfois elle nous met mal à l’aise. Néanmoins, nous avons découvert grâce à elle des occasions d’approfondir notre compréhension de l’œuvre créatrice, vivifiante, thérapeutique et réconciliatrice de l’Esprit Saint. Car la puissance de l’Esprit Saint nous touche de multiples manières : dans la douceur et la vérité, le réconfort et la créativité, la célébration et l’action, la sagesse et l’innocence, la communion et la sanctification, la libération et la sainte contemplation. Mais des esprits mauvais sont aussi à l’œuvre dans le monde et, malheureusement, même dans beaucoup de nos histoires et de nos communautés. Ce sont des esprits de violence, d’oppression, d’exclusion, de division, de corruption, d’égoïsme, d’ignorance, d’incapacité à vivre conformément à nos convictions, et de silence craintif face à l’injustice. En discernant l’œuvre de l’Esprit Saint, nous avons éprouvé le besoin de revenir constamment aux racines de notre foi en confessant le Dieu trinitaire qui nous a été révélé en Jésus Christ, le Verbe fait chair.

    A Athènes, nous nous sommes sentis profondément interpellés par les nouveaux défis que pose le besoin de réconciliation entre l’Est et l’Ouest, le Nord et le Sud, et entre les chrétiens et les croyants d’autres religions. Nous avons pris douloureusement conscience des erreurs du passé et nous prions pour que nous sachions en tirer les leçons. Nous avons reconnu notre tendance à renforcer les barrières en excluant ou en marginalisant pour des raisons telles que la race, la caste, le sexe ou le handicap, ou en tolérant, dans nos sociétés et dans nos Eglises, la perpétuation de pratiques d’oppression. A mi-chemin de la Décennie ‘vaincre la violence’, nous prenons à nouveau conscience que l’appel à la non-violence et à la réconciliation est au cœur du message de l’Evangile. En tant que rassemblement mondial, nous sommes interpellés par la violence que suscitent les forces de la mondialisation économique et du militarisme, et par la situation tragique des personnes marginalisées, en particulier les communautés autochtones et les populations déracinées par la migration.

    Saint Paul parle de la nouvelle création annoncée par le Christ et rendue possible par l’Esprit Saint. ‘C’était Dieu qui, en Christ’, dit-il, ‘réconciliait le monde avec lui-même, ne mettant pas leurs fautes au compte des hommes, et mettant en nous la parole de réconciliation. C’est au nom du Christ que nous sommes en ambassade, et par nous, c’est Dieu lui-même qui, en fait, vous adresse un appel. Au nom du Christ, nous vous en supplions, laissez-vous réconcilier avec Dieu’ (2 Corinthiens 5,19-20). Cette ‘nouvelle création’, nous la considérons comme l’objectif de notre entreprise missionnaire. Avec Paul, nous croyons que la réconciliation et la guérison sont essentielles au processus permettant de parvenir à cet objectif. La réconciliation, en tant que rétablissement de relations justes avec Dieu, est la source de la réconciliation avec soi-même, avec les autres et avec l’ensemble de la création.

    Mais le chemin de la réconciliation et de la guérison n’est pas aisé. Il exige l’écoute, la vérité, la repentance, le pardon et un engagement sincère en faveur du Christ et de sa justice. C’est pourquoi nous avons exploré de nombreuses formes sous lesquelles le pouvoir divin de guérison nous est offert : les guérisons survenues grâce à la prière, aux pratiques ascétiques et aux charismes de guérison, aux sacrements et aux services de guérison, à une combinaison d’approches médicales et spirituelles, sociales et systémiques, grâce aussi à la conscience que nous avons de la présence vivifiante de l’Esprit Saint, alors même que nous acceptons la maladie et les traumatismes et que nous continuons à les affronter. Nous avons célébré des services de guérison et nous avons été touchés en entendant le témoignage de professionnels de la santé et de conseillers chrétiens et le récit de leur lutte pour faire accepter une approche plus holistique.

    Vivant dans l’Esprit Saint, anticipant le Règne de Dieu, appelés à devenir les enfants de la nouvelle création de Dieu, nous devons aussi prendre acte de la nature troublée et confuse du temps présent. Nous souffrons en constatant que la mission de Dieu est dénaturée par les divisions et le manque de compréhension qui persistent dans les Eglises et entre elles. Aspirant à une participation plus complète et plus authentique à la mission de Dieu, nous continuons à déplorer notre incapacité à surmonter les barrières qui nous empêchent de célébrer ensemble le sacrement le plus profondément porteur de guérison et de réconciliation, l’Eucharistie – la Sainte Cène. Aussi avons-nous vu dans le thème de notre Conférence un appel à admettre humblement que nous avons nous-mêmes besoin de guérison et de réconciliation.

    Mais Dieu nous appelle à être une communauté d’espérance. ‘Appelés en Christ à être des communautés de réconciliation et de guérison’, nous avons continué, ici à Athènes, à nous efforcer de définir le type de communauté que Dieu désire que nous devenions, une communauté qui témoigne de l’Evangile en paroles et en actes, qui soit vivante dans le culte et l’apprentissage, qui annonce à tous l’Evangile de Jésus Christ, qui offre aux jeunes des fonctions à responsabilités, qui ouvre ses portes aux étrangers et accueille les marginalisés en son sein, qui s’engage aux côtés de ceux qui souffrent et de ceux qui luttent en faveur de la justice et de la paix, qui soit au service de tous les démunis, qui reconnaisse qu’elle est elle-même vulnérable et qu’elle a besoin de guérison, une communauté fidèle dans son engagement envers l’ensemble de la création. Nous prions l’Esprit Saint d’insuffler sa puissance de guérison dans nos vies, afin qu’ensemble nous cheminions vers la paix bénie de la nouvelle création.

    En conclusion, nous souhaitons exprimer notre profonde reconnaissance à toutes les personnes qui ont rendu possible la tenue de cette conférence. Dans le pays où saint Paul a proclamé l’Evangile de l’amour réconciliateur de Dieu en Jésus Christ, nous prions pour que la grâce de notre Seigneur Jésus Christ, l’amour de Dieu et la communion de l’Esprit Saint soient avec vous tous.

    Athènes, le 18 mai 2005

    (Signé par Ruth Bottoms, George Mathew Nalunnakkal et Jacques Matthey, membres membres du Bureau de la CME)


    « Le COE a une Bonne Nouvelle à communiquer », disent des responsables de mission – Simon Barrow

    Dans le prolongement de la treizième Conférence mondiale sur la mission et l'évangélisation (CME) – une conférence historique qui, organisée par le Conseil œcuménique des Eglises (COE), s’est tenue à Athènes du 9 au 16 mai 2005 –, les participants britanniques et irlandais appellent à « redécouvrir, dans une perspective œcuménique, la vocation essentielle des chrétiens : annoncer la Bonne Nouvelle de Jésus Christ ».

    Cet appel est exprimé dans une lettre adressée à la Commission de la CME qui s’est réunie cette semaine pour tirer les conclusions de la Conférence mondiale sur la mission et l'évangélisation à laquelle ont assisté, à Athènes, des participants venus de 300 Eglises, confessions et organismes chrétiens, représentant 105 pays. Avec des délégués protestants, catholiques romains, orthodoxes, anglicans, évangéliques et pentecôtistes des six continents, jamais une conférence de ce genre n’avait été aussi représentative.

    La rédaction de cette lettre au COE a été coordonnée par la Commission des Eglises sur la mission (CCOM) de « Churches Together in Britain and Ireland » ; elle a déjà été signée par l’évêque Graham Cray, évêque de Maidstone, le chanoine Tim Dakin, secrétaire général de la Church Mission Society, le père Philip Knights, de la Catholic Agency to Support Evangelization in England and Wales, le pasteur Jim Campbell, du Conseil des Eglises d’Irlande, la professeure Kirsten Kim, chargée de cours sur la mission à l’Université de Birmingham, et M. Simon Barrow, secrétaire de la CCOM, qui assure la liaison entre les activités, dans le monde entier, des départements et agences missionnaires des Eglises d’Angleterre, d’Ecosse, d’Irlande et du Pays de Galles.

    Se félicitant de l’attention que la Conférence mondiale sur la mission et l'évangélisation a accordée à l’œuvre de l’Esprit Saint et à la vocation de l’Eglise à être une communauté de réconciliation et de guérison, cette lettre dit que la prochaine étape, pour le mouvement œcuménique, consistera à apprendre comment mieux « discuter de la voie à suivre ».

    La lettre présente « l’évangélisation holistique » comme « le moyen de faire connaître la nature, l’identité et l’appel de Jésus Christ – lui qui supprime les murs qui divisent le monde ». L’évangélisation holistique associe la parole et l’action, « elle renouvelle l’Eglise et accroît sa capacité à améliorer son témoignage et son service ».

    Cette lettre a été signée au départ par les 30 participants à la conférence originaires de Grande-Bretagne et d’Irlande, et la liste des signataires continue à s’allonger. Elle dit aussi que le COE doit également établir des contacts directs avec des nouveaux mouvements missionnaires issus du Sud de la planète ainsi qu’avec « des expressions nouvelles de l’Eglise » que l’on trouve dans le Nord.

    « Le mouvement œcuménique est né de la Conférence missionnaire mondiale d’Edimbourg, en 1910, explique Simon Barrow, secrétaire de la CCOM en même temps qu’associé d’Ekklesia. Depuis cette époque, le centre de gravité démographique du christianisme est passé radicalement du Nord au Sud, ce qu’a confirmé l’éventail des participants à la réunion d’Athènes. Quelle que soit leur position en matière théologique, les chrétiens s’aperçoivent maintenant qu’il est urgent et indispensable de communiquer d’une manière nouvelle le message libérateur de l’Evangile dans un monde divisé. »

    Simon Barrow poursuit : « Il ne s’agit pas là d’une critique opportuniste du COE qui viendrait s’ajouter à d’autres ; c’est l’expression d’une association en profondeur qui donne une visibilité nouvelle à la mission prophétique et pastorale de guérison et de réconciliation dont le COE se fait l’avocat en tant que "communauté fraternelle" ».

    L’un des problèmes de l’évangélisation, c’est que la Parole (dans le grec du Nouveau Testament, ce terme signifie à la fois « bonne nouvelle » et « ambassadeur ») a souvent été détournée par des Eglises fondamentalistes guidées par des visées impérialistes d’inspiration américaine.

    Les auteurs de la lettre au COE soulignent qu’ils appellent à quelque chose de complètement différent, à une expression fidèle de l’Evangile, qui montre que c’est une source de justice, de paix, de guérison et de transformation personnelle et sociale.

    Lors des réunions plénières de la conférence d’Athènes, plusieurs intervenants ont mis en garde contre les « abus » que l’on pouvait faire de la Parole et contre le prosélytisme, lorsqu’une Eglise s’en prend particulièrement à une autre pour lui enlever des membres. C’est là une question qui préoccupe particulièrement les orthodoxes, et le COE s’est fermement prononcé contre les violations du « témoignage commun » qui abusent de l’évangélisation pour justifier de telles actions.

    Pourtant, contrairement à l’image qu’il présente souvent, le Conseil œcuménique des Eglises s’est donné pour mandat de proclamer au monde entier le message de l’amour transformateur du Christ, ainsi que l’a précisé le pasteur Carlos Ham, chargé du programme « Evangélisation » du COE, à l’occasion d’un séminaire qui s’est tenu la semaine dernière dans le cadre de la CME.

    Dans cet esprit, la lettre adressée par les responsables d’Eglises britanniques et irlandais va dans le sens des mesures que beaucoup aimeraient voir le COE prendre. (http://www.ekklesia.co.uk/content/news_syndication/article_050520evang.shtml)


    Cette Lettre est publiée dans les quatre langues du COE. On la trouve aussi, sur Internet, à l’adresse suivante :
    http://www.wcc-coe.org/wcc/what/mission/evlet-index.html