Message de soutien du pasteur Konrad Raiser, secrétaire général du Conseil oecuménique des Eglises, à la Campagne internationale contre la torture
(Envoyé le lundi 12 février 2001 à la Fédération internationale de l’ACAT (Action des chrétiens pour l’abolition de la torture) (FI.ACAT))
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La pratique de la torture s’est répandue au plus fort de la période des dictatures militaires et des régimes autoritaires des années 70 et 80. A la fin de la guerre froide, au moment où les peuples exigeaient une démocratisation et des réformes politiques dans différentes régions, on a pu espérer qu’elle allait disparaître. Mais cela n’a pas été le cas et la torture continue à être pratiquée dans de nombreuses régions du monde. Aujourd’hui, ce ne sont plus seulement les forces de sécurité des Etats qui en font usage, mais également des groupes armés privés qui sont en guerre non seulement contre l’Etat, mais entre eux.

C’est pourquoi la décision qu’a prise Amnesty International de lancer une campagne mondiale contre la torture vient à son heure, et elle est d’une grande portée. Cette campagne est soutenue par la Fédération internationale de l’ACAT (Action des chrétiens pour l’abolition de la torture), une organisation connue pour son travail précieux dans ce domaine, voué au contact direct avec les victimes. Cette campagne coïncide avec le lancement de la Décennie « vaincre la violence » du Conseil oecuménique des Eglises. La Huitième Assemblée de Harare a décidé de lancer cette Décennie, et d’ « adopter avec les Eglises une stratégie visant à créer une culture de la non-violence, en travaillant en lien et en interaction avec d’autres partenaires et organismes internationaux, et en explorant et développant des méthodes appropriées pour le règlement des conflits et l’instauration d’une paix juste, dans le contexte nouveau-né de la mondialisation. »

Pour les chrétiens, le Royaume de Dieu est un Royaume de la vie. Lorsque la vie est écrasée, lorsque les forces du mal et des ténèbres se déchaînent pour mutiler et tuer, c’est la réalité de Dieu qui est ignorée et niée. Les cris des victimes trouvent un écho dans cette supplication : «Jusqu’à quand, Seigneur ? Jusqu’à quand aurai-je en mon âme la douleur, le chagrin en mon coeur, de jour et de nuit ? » (Psaume 13, 1-2).

La plus atroce des violations des droits humains est l’atteinte délibérée portée à l’intégrité de la personne humaine en la défigurant. Elle cherche à détruire le respect de soi de la victime, non seulement dans l’instant de la torture, mais pour le reste de ses jours. Souvent, de tels actes sont perpétrés avec la complicité d’agents de l’Etat et même de personnes de la profession médicale qui violent ainsi le serment de leur ordre, par lequel ils se sont engagés à ne jamais causer de mal. Ne pas subir la torture est un droit fondamental que garantissent des législations nationales et internationales, stipulant que les gouvernements sont responsables d’en prévenir la pratique et de poursuivre et punir ceux qui s’en rendent coupables.

Le Comité central du COE était conscient de ce que ce fléau a d’horrible lorsqu’il déclarait en 1977 : « Aujourd’hui, nous sommes sous le jugement de Dieu, car en notre temps, les ténèbres, le mensonge et l’inhumanité des chambres de torture sont devenues une réalité plus largement répandue et plus atroce qu’en aucune autre période de l’histoire. »

Face à l’accroissement des actes de torture, au nom de Jésus Christ, Vie du monde, nous réaffirmons l’engagement commun des Eglises membres, unies dans la communauté fraternelle du Conseil oecuménique des Eglises, et nous les prions instamment d’oeuvrer plus énergiquement encore en vue de l’élimination de la torture sous toutes ses formes, tant dans leurs lieux de vie et de témoignage que sur la scène internationale. Ainsi, nous sommes en solidarité avec la Fédération internationale de l’ACAT et avec toutes les organisations de la société civile qui oeuvrent en faveur de l’abolition de la torture. Ensemble, nous pouvons devenir des instruments au service de l’accomplissement de la promesse de Dieu, selon laquelle chaque être humain pourra jouir de la plénitude de vie que Dieu a voulue, libre de la peur, dans la dignité propre aux personnes créées à la sainte image de Dieu.


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